L'Autre dans l'art de Sumikiri

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Le rapport à l’autre pose question dans les arts internes car ils semblent se centrer en premier lieu sur la réalisation de l’individu. Une certaine qualité de réalisation étant obtenue, l’expérience engloberait alors autrui, confirmant que lorsqu’un individu est attiré par la découverte de la transcendance, il a toujours besoin de se retirer en lui-même. Or, dans l’art de Sumikiri (en japonais : «action d’enlever les quatre angles à un carré»), toute réalisation passe obligatoirement par l’expérience de l’autre.

L’Autre : finalité de l’art de Sumikiri
Sur le plan humain, la finalité de notre art est d’avoir une attitude de Miséricorde et d’Amour quelle que soit la conduite de l’autre, même dans ses extrémités les plus violentes. Nous comprenons donc qu’il n’y a pas de mouvement ou de technique sans cet Autre. Il est au pratiquant ce que l’eau est au poisson, l’air à l’oiseau. L’Autre est à la fois support et élément créateur de la gestuelle. L’Autre n’est pas envisagé tel un adversaire mais comme un partenaire, il est la différence dont il faut tenir compte sans cesse, mais aussi le miroir dans lequel nos erreurs et nos réussites se reflètent.

Se guérir soi et guérir l’Autre
Lorsque le Maître Morihei Ueshiba maintenait au sol un partenaire, son attitude consistait à métamorphoser le ki de l’attaquant, agissant tel un thérapeute, il déclarait : «Je l’ai simplement aidé à se calmer en me mettant à sa place !». Nous comprenons le principe du «Shobu-Aïki» qui consiste effectivement à se mettre à la place du partenaire et agir avec confiance et foi en rayonnant l’énergie. C’est une mission de pacification car O Sensei déclarait que son art «est médecine pour un monde malade». Tout attaquant est considéré comme un être souffrant, en détruisant la spirale de violence, nous nous sauvons nous-même, en un même geste, nous guérissons attaquant et attaqué.
C’est pour cela que nous avons adopté comme règles fondamentales :
- Percevoir l’intention du partenaire,
- Adhérer à l’action du partenaire,
- Se mettre à la place du partenaire.

Rendre l’Autre à lui-même
L’Autre, on ne peut l’aliéner, ni le dominer, car alors nous sommes dans l’erreur, et il n’y a pas d’harmonisation des énergies. L’Autre que l’on ne peut endoctriner, ni façonner, ni formater, car alors nous deviendrions des manipulateurs. Il n’existe de «Mouvements Univers» réussis que si nous rendons l’Autre à lui-même, dépouillé d’agressivité, d’inertie non créatrice, d’hostilité ou de complicité collaboratrice, vidé ensemble de tout attachement. La gestuelle correcte signifie que nous sommes parvenus ensemble à recréer un espace-temps harmonique.

L’harmonie de la relation
Nous ne rappellerons pas ici tous les procédés «internes», nous évoquerons seulement pour nous faire comprendre la symbolique bien connue du Taïki. Tous les «Mouvements Univers» que nous traçons avec le partenaire sont des spirales nées du Taïki, expression de la Loi d’Harmonie, faite de balancements, de «pleins et de vides», d’alternances, d’expansions, de contractions, d’inspirs et d’expirs, de rythmes et de girations. Ces mouvements calqués sur le déroulement du Taïki s’enchaînent dans une alternance de yin et de yang, ainsi avec le partenaire nous jouons selon le principe du mouvement perpétuel qui englobe les phases de naissance — croissance — décroissance — mort — re-naissance… Ce procédé permet de rejoindre l’idéal des Sages anciens qui était d’unir le Ciel, l’Homme et la Terre, pour lesquels les jeux de l’altérité conduisaient à l’Unité.
Comme l’exprimait Morihei Ueshiba : «Une fois que vous les aurez enveloppés dans votre c½ur, vous serez à même de les guider le long du chemin que vous indiqueront le Ciel et la Terre».

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Source : http://www.sumikiri.com